Dragonneau dormant marbre l27 h19 |
Puis il lui faut donner forme aux terreurs qui nous
habitent, pour qu’on puisse les regarder en face, les affronter. Fixer dans la
pierre ces monstres qui nous obsèdent, les rendre accessibles aux malheureux
humains.
« Le souffle du dragon est multiforme. Solitudes vertigineuses,
et la mienne en écho ».*
Il lui reste à donner ses lettres de noblesse à la
mythologie issue des profondeurs de l’enfance, et que chacun se construit pour
supporter la fragilité de sa vie. « J’ai les mains en purée : ma
dernière descente de croix, après des heures de polissage, est comme une enfant
devenue adulte. Elle vit sa vie propre, dans la jeunesse conjuguée de sa nature
de marbre et de l’éternel présent du roman ».* Alors, « la fréquentation du genre humain devient quasi
supportable ».*
François Varry s’attaque aux pierres et aux bois les plus durs pour leur extorquer cette extraordinaire douceur qui semble habiter les figures qui le hantent et auxquelles il donne corps. Mages, anges, dragons et dragonnettes, saintes et saints sont les partenaires et les déclinaisons d’un Christ qui a charge d’humanité, voire d’humaniser les petites créatures. Quand il est représenté, il prend la forme d’un, qui a épuisé son travail d’homme, et se retire dans la mort, en laissant à d’autres, des femmes, la tâche du lien à tisser.
Le Christ au Mont des oliviers fait exception. Concentré en
lui-même, il recueille toute la compassion et la douceur qui manquent au monde.
C’est une communauté de tendresse pudique et inquiète qui
s’anime, dans un retour aux origines où l’homme peut se nicher au creux du
dragon… A moins qu’il n’y soit menacé d’engloutissement ! Qui sait si les
volutes généreuses de ces animaux fantastiques ne sont pas
mortelles ? Pourtant leur rondeur
apaise et se ferait presque protectrice dans leur féminité.
A cette énigme, les femmes répondent par un amour infini, et l’implicite qui les lie relève d’une initiation, de fait, aux mystères du vivant, dans son nouage avec la mort. A preuve le sourire de la Vierge noire à son enfant déjà alourdi de ses charges. Ces femmes sont toutes semblables et toutes différentes, chacune porte sa singularité : un nez, un sourire, une coiffure….
A cette énigme, les femmes répondent par un amour infini, et l’implicite qui les lie relève d’une initiation, de fait, aux mystères du vivant, dans son nouage avec la mort. A preuve le sourire de la Vierge noire à son enfant déjà alourdi de ses charges. Ces femmes sont toutes semblables et toutes différentes, chacune porte sa singularité : un nez, un sourire, une coiffure….
Notons que dans les descentes de croix on ne distingue pas
saint Jean des femmes. Juste parfois un
petit bandeau laisserait penser qu’on
pourrait le reconnaître. Illusion ! Il semble qu’au fond Jean
l’Evangéliste et Marie mère de Dieu se rejoignent dans leur mission d’accoucher
le Christ dans la vie, charnelle pour Marie, spirituelle pour Jean ( « Au
commencement était le Verbe » Saint Jean) ...
Pas de regard pour ces figures. Elles sont, telles Bouddha,
tournées vers l’intérieur, vers ce qui fonde l’humain, vers l’essentiel. Mais
là encore, une exception : Le mage touché par le doigt de l’ange qui lui
indique l’étoile divine. Cet œil grand ouvert révèle ce que cachent les
paupières closes : une vigilance absolue à ce qui lie le présent au passé,
et à ce qu’il engage d’avenir.
Laure
Thibaudeau
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